Développement fœtal et alimentation de la poulinière
23.02.2024 -
SOMMAIRE :
- Fondamentaux sur le développement fœtal du poulain
- Evolution des besoins de la jument gestante
- L’impact de l’alimentation de la poulinière sur le développement du poulain in-utéro
Fondamentaux sur le développement fœtal du poulain
La gestation chez la jument varie entre 320 et 365 jours, pour une moyenne de 11 mois.
Découvrez les principales étapes du développement fœtal selon le trimestre de gestation (tailles et poids indicatifs pour un cheval de 500 kg de poids vif au stade adulte).
De 0 à 3 mois : premier trimestre de gestation
Au cours du premier mois, on passe du stade embryonnaire au stade fœtal durant laquelle les organes entament leur formation.
Au 1er mois, le poulain mesure environ 1 cm et pèse quelques grammes.
Durant le 2ème mois, les cellules des yeux et des onglons se développe, le placenta se forme pour s’attacher à la paroi utérine. C’est une étape cruciale du développement fœtal.
À 45 jours, le poulain acquiert la différenciation sexuelle, et à la fin du 2ème mois, il mesure 5 à 7 cm et pèse 15-20 grammes.
Au 3ème mois, le poulain double sa taille (environ 14 cm) et multiplie son poids par 10 (environ 150 g).
De 4 à 6 mois : deuxième trimestre de gestation
Au 4ème mois, les organes internes, les tissus oculaires et les ébauches de cornées se développent.
Le fœtus mesure environ 25 cm et pèse 700 g.
Au 5ème mois, les premiers poils arrivent. Le placenta et le cordon ombilical sont totalement formés : les échanges entre la mère et son poulain sont en place. La formation du squelette débute et le poulain mesure 35 cm avec un poids de 2 kg.
Au 6ème mois, l’hypophyse (partie du cerveau) se forme, la crinière et la queue commencent à se développer. La croissance du poulain entraine l’extension de l’utérus qui bascule dans la cavité abdominale. Le poulain mesure environ 50 m et pèse 5 kg.
De 7 à 11 mois : troisièmes et quatrièmes trimestres de gestation
C’est à cette période que la croissance s’accélère de manière spectaculaire
Au 7ème mois, le poulain mesure quasi 60 cm et pèse environ 10 kg. À 8 mois, il atteint 80 cm et pèse 15 kg.
Au 9ème mois, les poils recouvrent le fœtus. Le poulain mesure alors environ 1m et pèse 30 kg.
Lors du 11ème mois, les derniers organes finissent leur développement, le corps est entièrement poilu et le poulain se tourne pour le poulinage. Il mesure alors 1m10 environ et pèse entre 40 et 50 kg.
Evolution des besoins de la jument gestante
Avant la saillie
Pour assurer une bonne fertilité et préparer la gestation, il est important que la jument ne soit pas carencée et/ou sous-alimentée. Il est conseillé de distribuer un aliment complémentaire de fourrages adapté aux chevaux d’élevage, assurant ainsi les besoins nutritionnels de la poulinière.
Des aliments adaptés sur le plan minéral, vitaminiques et riches en acides gras essentiels (oméga 3) contribuent à la bonne expression des chaleurs, au bon fonctionnement du cycle ovarien et augmentent les chances d’obtenir une saillie fécondante et un poulain.
Du début de la gestation et jusqu’au 8ème mois
C’est la phase de la gestation la moins demandeuse en besoins alimentaires.
Durant les 7 premiers mois de la gestation, le poulain va peu développer sa taille et sa masse. Il atteindra seulement 17 % de son poids de naissance à la fin de cette période. La poulinière peut être nourrie avec une ration à base de fourrages (foin, herbe) et de concentrés, si la ration de fourrages est déséquilibrée.
Généralement, les périodes de saillie pour les juments de courses s'étendent de janvier à mai, tandis que pour les juments de sport, elles vont de mars à juillet. Cette planification vise à garantir un accès à une herbe printanière nutritive pendant les deux premiers tiers de la gestation, réduisant ainsi le besoin de concentrés pour les juments non-suitées pendant cette période.
Cependant, il est essentiel de fournir des compléments minéraux et vitaminés (CMV) pour soutenir la gestation des juments qui ne reçoivent pas de ration alimentaire. Le seau à lécher KUP MIN ou le bloc minéral EDHYA MIN BLOC sont d'excellentes options dans ce cas, car l'administration de CMV sous forme de poudre ou de granulés peut être plus difficile à mettre en œuvre. En plus de cela, il est recommandé de fournir une pierre à sel et de l'eau claire en libre-service.
Les 3 derniers mois de la gestation
Dans les 3 derniers mois de la gestation, la masse corporelle de la jument s’accroît d’environ 6-7 %, soit 45 kg pour une jument de 550 kg. Cette augmentation est due à la croissance importante du fœtus et cette période est cruciale pour le développement du poulain. Les besoins alimentaires augmentent en conséquence.
Par ailleurs, dû à la taille du fœtus et la place qu’il occupe dans l’abdomen de sa mère.
L’absorption de fourrages diminue, il est donc nécessaire de compenser cette perte en apportant un aliment riche en énergie et en protéines (mais attention aux excès !). Pendant la seconde moitié de la gestation, les besoins augmentent graduellement : de 35% pour l’énergie et de 80 à 85% pour les besoins en protéines.
Il est crucial de ne pas négliger les apports en minéraux et vitamines. Les besoins en phosphore et en calcium doublent au cours de la seconde moitié de la gestation, tandis que les besoins en vitamine A et E augmentent de 60%, de 80% pour la vitamine D.
Il faut veiller à apporter des acides aminés (constituants de la protéine), notamment en lysine permettant l’absorption de calcium pour le bon développement squelettique du poulain. Une supplémentation minérale adaptée de la poulinière sur le dernier trimestre de gestation est conseillée.
Nourrir la poulinière pendant la lactation
Pendant les premiers mois de lactation, la demande en nutriments de la poulinière augmente très fortement. Les besoins en protéines doublent et les besoins énergétiques peuvent augmenter de 70 % .
Les besoins en minéraux, notamment pour le calcium et le phosphore. Cet accroissement des besoins est lié à la courbe de la lactation et à l’augmentation de la production de lait qui atteint son pic environ 45 jours après la naissance.
Plus le poulain grandira, plus l’alimentation de la jument pourra diminuer en quantité. La lactation diminue et le poulain ne dépendant plus exclusivement du lait maternel.
Dans l’optique de préparer le sevrage et le tarissement de la jument allaitante, il est recommandé de diminuer progressivement la quantité d’aliments distribués à la poulinière, jusqu’à sa ration d’entretien.
L’impact de l’alimentation de la poulinière sur le développement du poulain in-utéro
Le développement du fœtus lors de la gestation dépend de son matériel génétique mais est aussi influencé par les paramètres environnementaux : c’est ce qu’on appelle l’épigénétique. Parmi ces paramètres, l’alimentation de la poulinière joue un rôle important. Mal gérée, elle peut impacter négativement la santé et les performances du futur poulain.
Il y a deux paramètres alimentaires qui sont cruciaux :
- Eviter les excès d’énergie
À partir du 6ème mois de gestation, les besoins en énergie de la poulinière augmentent. Distribuer une ration trop riche en énergie ne permet pas d’optimiser le développement du fœtus mais peut au contraire entrainer l’apparition de certaines anomalies métaboliques chez le poulain.
Il est démontré que la nature et la qualité de l’énergie apportées, notamment par l’amidon et les sucres, impactent le développement fœtal. Les juments, recevant une charge d’amidon trop importante, ont un placenta qui présente des altérations au niveau vasculaire, ce qui limite les échanges de nutriments, essentiels au bon développement du poulain.
L’ostéochondrose a une prévalence plus importante chez les poulains des juments ayant reçu une alimentation trop riche en amidon pendant la gestation.
Le surpoids maternel impacte très négativement le développement du poulain et sa santé à long terme. Des recherches ont révélé que les poulains issus de poulinières en surpoids présentaient une prévalence accrue de lésions ostéochondrales ainsi que des anomalies métaboliques telles qu'une moindre sensibilité à l'insuline, ce qui pourrait être lié à une intolérance à l'exercice.
Pour ne pas impacter négativement la santé et les futures performances du poulain, il est primordial de bien gérer l’alimentation de la poulinière. Il est conseillé d’apporter le concentré en le fractionnant autant que possible, afin de limiter les apports d’amidon par repas. Nos aliments apportent une part importante de l’énergie sous forme de matières grasses et de fibres digestibles, l'objectif étant de limiter les pics glycémiques néfastes.
Le suivi régulier de l’état corporel de la poulinière détecte rapidement le surpoids et permet d’y remédier.
- Maitriser les apports en minéraux, vitamines et oligo-éléments
Les carences et les excès en minéraux, vitamines et oligo-éléments sont néfastes chez le cheval adulte et lors de la gestation. A l’heure actuelle, les besoins de la jument gestante et l’impact sur le développement du fœtus in-utéro sont peu étudiés, cependant, sur certains de ces composants on observe que :
- - - Les acides gras oméga 3 jouent un rôle sur le développement de l’embryon, le fonctionnement de l’utérus au moment de l’insémination (amélioration de l’environnement utérin) et la qualité du plasma et du colostrum. Maitriser l’apport de cuivre dans la ration de la jument gestante évite l’apparition de pathologies ostéoarticulaires en cas de carence.
- - - Le sélénium est important dans le bon développement du poulain. La maladie du muscle blanc (ou dystrophie nutritionnelle), souvent fatale, est liée à une carence en sélénium. Le colostrum étant très faible en sélénium, le poulain n’y a accès que par transfert placentaire. Il est donc impératif de bien supplémenter la jument gestante.
De plus, le sélénium est un puissant oxydant qui protège les biomolécules des phases d’activité métaboliques intenses comme pendant le dernier trimestre de gestation.
- - La vitamine E est un autre antioxydant essentiel. Il permet le bon transfert des immunoglobulines entre la jument et le poulain. Elle joue un rôle indirect dans le développement de l’immunité. Une supplémentation de la poulinière en vitamine E, surtout pendant le dernier trimestre, est donc recommandé.
Notre conseil est de veiller aux grands équilibres vitaminiques et minéraux (Ca/P, Zn/Cu etc.…). Nous y apportons une attention toute particulière dans nos formulations. Nous intégrons des matières grasses riches en oméga 3 sous forme d’huile de colza et de graines de lin extrudées. L'apport de sélénium est sous forme organique, la forme la plus biodisponible et non-toxique pour la jument et le poulain.
Sources :
Martin-Rosset, W. et coord. 2012. Alimentation des chevaux. Paris : Editions Quae.
NRC (Comittee on Nutrient Requirements of Hors), 2007. Nutrient Requirement of Horses : Sixth Revised Edition. 6ème edition. Washington, D.C. : The National Academies Press.
Equipedia IFCE. 2017. Les besoins de la jument gestante. [en ligne].
Equipedia IFCE. 2018. Alimentation de la poulinière – effets sur le poulain in utero. [en ligne].
Peugnet P. et al. 2016. Management of the pregnant mare and long-term consequences on the offspring. Theriogenology 86 (1) : 99-109.
Peugnet P. and Chavatte-Palmer P. 2015. La santé du poulain se prépare dès la gestation. Équ’idée. Septembre 2015. Article 2.